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Les livres recommandés par vos bibliothécaires - 54

Femme tenant une liseuse
Image par Perfecto_Capucine de Pixabay

Amélie nous recommande deux romans jeunesse : l'un sur une jeune bachelier voyageant en train à travers l'Europe et l'autre où une jeune étudiante syrienne s'interroge sur son avenir dans son pays. Christophe s'est senti glacé par un roman dont le personne principal s'immerge dans le Palais de justice de Paris.

 

Passager de l'été / Jean-Philippe Blondel  

Passager de l'étéPar Amélie, bibliothèque de Vif

 Partir et grandir

Quand Samuel, fraîchement majeur et bachelier, décide de partir seul en Europe après le désistement de son meilleur ami, ça donne un récit très touchant. Il part avec la trouille de ce qui pourrait lui arriver, des mauvaises rencontres qu’il pourrait faire. Des pensées plutôt négatives alors que son périple va lui démontrer le contraire : l’Autre n’est pas si mauvais qu’on le croit. Il va même se laisser guider par ces rencontres, ces personnes qui laisseront une trace dans sa vie. Samuel avait emporté la camera de son père sans ses bagages, sans savoir vraiment comment il l’utiliserait. Elle sera la confidente de certains, de témoignages forts.

Jean-Philippe Blondel ne raconte pas que l’histoire d’un jeune qui sort de sa zone de confort, il parle aussi des prises de conscience politiques, environnementales. Des générations qui devront inventer le monde de demain pour limiter les dégâts. Et de l’addiction à ce petit appareil rectangulaire qui sert moins à communiquer qu’à se mettre en scène.

Tant que fleuriront les citronniers / Zoulfa Katouh  

Tant que fleuriront les citronniersPar Amélie, bibliothèque de Vif

Vivre dans la peur
Salama n’a pas 20 ans et a dû laisser derrière elle sa vie d’ado pour entrer violemment dans celle d’adulte. Elle passe d’étudiante en pharmacie à chirurgienne dans un hôpital à Homs, en Syrie. Tous les jours, elle doit fait face à la misère et à la douleur, à la peur des bombardements, des tirs de snipers. Chaque jour est un combat contre la mort : comment sauver des vies avec des moyens si faibles ? Quand l’eau ne coule plus du robinet, mais uniquement du ciel, quand le ventre crie faim, quand on est épuisé physiquement et moralement.

Salama est face à un dilemme : rester par amour pour son pays et pour sauver les vies qui peuvent l’être ou partir pour sauver sa peau, en attendant que la paix revienne peut-être un jour en Syrie. Partir, n’est-ce pas trahir son pays ? Peut-on défendre son pays en étant loin ? Et si elle décide de partir, arrivera-t-elle vivante à destination ? Pourra-t-elle vivre avec ses traumatismes ?
Et parmi toute cette grisaille, ces ombres, l’auteure distille des touches de poésie qui donnent la force de s’accrocher.

C’est le premier roman de Zoulfa Katouh. En rien moralisateur, il nous fait cependant nous questionner : en Syrie et partout où la dictature sévit, qu’est-ce qu’on attend pour arrêter ces massacres ?

Le témoin / Joy Sorman

Le témoin Par Christophe, bibliothèque de Varces

Vengeance

Le témoin est le dernier roman de Joy Sorman.

L’auteure d’A la folie et de Seyvoz (écrit à quatre mains avec Maylis de Kerangal) immerge Bart, son narrateur mutique, au sein du Palais de Justice de Paris. Et quand je dis "immerge", ce n’est pas qu’un peu : Bart, non content d’assister à un maximum de séances du tribunal, décide également d’y vivre… nuit et jour.

Se rendre compte et rendre compte : telle est la volonté de Bart et, par voie de conséquence, celle de Joy Sorman dont on imagine très bien le travail d’investigation préparatoire à ce roman.

Au fil des pages, le constat est d’une violence assez déstabilisante pour le lecteur (principalement lors des comparutions immédiates). Car ce n’est pas tant dans sa réponse à la question "Est-ce que la Justice est juste ?" que la force du Témoin se joue, mais bien sur cette peinture d’un théâtre contemporain de la lutte des classes (ce n’est pas un gros mot). Où la notion même de vengeance (!) transpire souvent de ces pages. Où la Justice semble aller, par son fonctionnement vorace, jusqu’à s’autoalimenter.

C’est assez glaçant.